Au milieu des plantes fragiles
qu’une vitre épaisse défend,
plusieurs boutons pointent, fragiles,
un premier cocon vert se fend.
Déjà, le long des pots d’argile,
on devine du bleu, du blanc.
Un cyclamen joue au volant,
– soignez les petits pots d’argile –
Mais plus haut, bien plus haut déjà,
vers les branches qui se ravivent
une fée a passé. Déjà
en bouffette de pourpre vive
Le premier cocon se changea.
Cocarde rouge – est-ce un insigne ?
Velours sombre jaspé de clair,
dans le sang, deux plumes de cygne…
De quelle infante est-ce l’insigne ?
Rose orgueilleuse de l’hiver,
on la sent faite pour des gerbes
qu’on vendra tôt, qu’on vendra cher,
bien avant la saison des gerbes !
Fleurs des sillons, des bois, de l’herbe,
vous n’entendez rien à cela.
C’est pour des doigts trop blancs, trop las,
que l’on cueille ces branches-là.
Branche verte aux feuilles vernies
vous offrant en cérémonie
cette corolle sans parfum…
Vers les boudoirs, vers les palaces,
les rameaux s’en vont un à un.
Dans le cadre des hautes glaces,
saluez la fleur des palaces.
Vous parlez de cette main lasse
de la Dame aux camélias.
Je ne sais pas ce qu’il y a
dans le cœur des camélias ;
je n’y cherche ni l’humble grâce
ni l’arôme de tant de fleurs –
De s’ouvrir à la Chandeleur
dans une atmosphère factice,
d’être rare; d’être une fleur
avant que d’autres ne fleurissent,
de tout ce qu’il y a de factice
lui sais-je gré ? Je ne sais pas.
Je l’aime à l’abri des frimas
pour tout ce qu’il est ou n’est pas.
Immobile papillon rouge
entre deux feuilles qui ne bougent
il est sous les vitres, là-bas,
le premier camélia rouge.
Sabine Sicaud,
Les poèmes de Sabine Sicaud, 1958 (Recueil posthume)
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Sabine Sicaud, née le 23 février 1913 à Villeneuve-sur-Lot
et morte le 12 juillet 1928 dans la même commune,
est une poétesse française.
Elle est née et morte à Villeneuve-sur-Lot,
dans la maison de ses parents, nommée La Solitude.
Solitude est aussi le titre d'un de ses poèmes.
C'est une beauté sans pareil et c'est une belle poésie